Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Roman-Roman
Roman-Roman
Visiteurs
Depuis la création 1 296
15 avril 2013

C’étaient les premiers signes qu’il me fallait songer à disparaître

II - 20

C’est un texte chiffré ou une langue que j’ignore, de l’ouzbek par exemple transcrit ni en cyrillique comme l’exigeait l’union soviétique, ni en alphabet arabe comme dans les temps historiques, en alphabet latin; c’est un très long mail, plusieurs pages, aussi je me contenterai de vous en donner un résumé — c’est une absolue perfection, dit Montaigne, de savoir jouir loyalement de son être — et celui-ci ne nous est que trop peu octroyé. C’est une autre histoire et de toutes façons j’ai travaillé avec tellement de monde. Disant cela, il s’interrompit un moment, il avait l’air inquiet, parlait bas d’un ton un peu rauque, regardait sans cesse autour de lui: il semblait aux aguets — c’est une autre histoire et puis j’ai travaillé avec tellement de monde — Disant cela, il s’interrompit un moment, il avait l’air inquiet, parlait bas d’un ton un peu rauque, regardait sans cesse autour de lui: il semblait aux aguets… c’est une connerie, c’est une des contraintes du métier, c’est une façon de voir les choses, c’est une fiction de fictions, chacune reliée aux autres, apportant de nouveaux éclairages sur un ensemble d’histoires différentes en certains points identiques: c’est une grande marque de confiance, c’est une mission; quelque chose de très important dont le Maître a bien voulu me charger personnellement, c’est une œuvre interactive d’un artiste contemporaine, Don Spare; c’est une question de vie ou de mort, je n’ai pas le droit de refuser, c’est vachement plus excitant! C’est vrai que ce que je fais est un peu stupide, n’est-ce pas déjà stupide de raconter des histoires et de prétendre que d’autres C’est vrai que la vie de mes proches avait été des plus chaotique, c’est vrai que mon fils a plutôt tendance à jouer sur les réseaux de cybergames, il faut que je me fâche pour le faire aller jouer dehors ou simplement prendre l’air, c’est vrai, je cède ainsi un peu à la facilité. Aujourd’hui, je n’avais pas beaucoup de temps pour vous écrire, c’est-à-dire, c’est-à-dire ? insiste le commissaire vaguement amusé par le jeu de cache-cache auquel elle se livre, c’est-à-dire à ne pas activer son ordinateur pendant une période de temps donnée, c’est-à-dire la transcription de systèmes de signes de jeux sur les langues. C’étaient de purs mots de conversation, comme nous nous en disons dans ces moments où trop agités pour rester seuls avec nous-mêmes nous éprouvons le besoin, à défaut d’autre interlocuteur, de causer avec nous, sans sincérité, comme avec un étranger. C’étaient les premiers signes qu’il me fallait songer à disparaître si je voulais survivre c’était bien compliqué et, au lieu de le rassurer, tout ceci commença à lui paraître louche. C’était bien dans sa manière cet esprit de logique: puisque l’arabe se lit de droite à gauche et que, dans sa transcription nous le lisons de gauche à droite inversant le sens de lecture alors, les mots le parasitant, s’ils appartenaient à une autre langue, devaient obéir à cette même logique, et se lire à l’envers, non plus à partir du début du fichier au contraire depuis sa fin. C’était bien lui, cette exaltation: Écosse et Asie centrale, cheveux de jais et regard bleu limpide, un mélange étonnant détonnant, un informaticien poète capable de consacrer des journées entières à mettre au point un programme ne lui permettant rien d’autre que de trouver, dans des milliers de pages, celles qui parlaient d’amour. C’était bien lui, cette exaltation: Écosse et Asie centrale, cheveux noirs et regard bleu cristallin, un mélange explosif fabuleux, un informaticien poète capable de créer les logiciels réseau les plus performants, aussi de réserver des journées entières à mettre au point un programme lui permettant de trouver, dans des millions de caractères, les fragments qui parlaient d’amour C’était comme si le thème de ma lettre du jour m’était dictée par le hasard qui, s’il ne dicte pas les événements, les fait si souvent exister. C’était en 1979, 1968 n’était pas loin et ses traces dans les esprits: à l’est pas les mêmes qu’à l’ouest, elles n’en existaient pas moins; c’était en décembre, le froid était vif le ciel, pour l’accueillir, tendait sur sa tête le bleu éclatant de son voile (c’était en effet une fille splendide, vive, intelligente, parlant un français parfait): Il dit avoir compris l’amour de Stanislas. C’était en juillet 1983, dans le cadre d’une mission officielle… je devais accompagner une délégation officielle au Liban où la situation se détériorait de jours en jours entre les Forces Libanaises et le Front de salut national C’était fin 1988, ils ne se sont plus rencontrés. C’était lui et ce n’était pas lui, il me parlait d’un certain Hocquard, dont il disait qu’il était poète; il me parlait d’Austin, de Wittgenstein et je ne savais pas où tout cela allait nous mener… C’était impossible, c’était le cas, c’était moins une, c’était pour nous tout un symbole… C’était quand même le bon temps, c’était quand même probable.

Publicité
Commentaires
Archives
Publicité
Pages
Publicité